10 avril 2020

My Favorite Things #4 : les albums préférés de Dominique Auer



Certains albums, tels des poèmes que nous connaissons par cœur, nous accompagnent au long des années, des décennies. Chargés de souvenirs, déclencheurs de nos évolutions, témoins de nos cheminements, énigmes résistant à l'usure du temps, traversant les modes, conservant la fraîcheur de la découverte à chaque nouvelle écoute....


Merci à Dominique Auer, responsable musique et cinéma, médiathèque de Pacé, président de l'ACIM, et musicien, d'avoir répondu à l'invitation.



Laisse béton (Place de ma mob) / Renaud / 1977 / Polydor

Depuis l'adolescence, je suis fan de Renaud parfois au grand dam de mes proches qui pointent du doigts les (multiples) contradictions du chanteur énervant. Je me suis malgré tout arrêté à l'album Rouge sang, préférant l'inspiration du Renaud des années 70/80/90.
Les 12 titres du deuxième album de Renaud contiennent pas mal d'histoires de loosers ou d'anti-héros. C'est peut-être pour ça que c'est mon préféré.




Een rondje Holland / Ex Orkest (The Ex) / 2001 / Ex records

J'ai fait la connaissance de The Ex grâce à Yann Tiersen qui reprenait Kokend Asfalt (State of shock) dans ses concerts électrifiés post-Amélie Poulain. Je trouvais cette chanson pleine d'une énergie politique salutaire. Quand j'ai découvert que la chanson originale avait aussi été enregistrée par ce groupe hollandais avec un orchestre de cuivres (il se trouve que je suis tromboniste), j'ai tout fait pour me procurer l'album. Du punk DIY avec des oreilles ouvertes à 360 degrés vers les autres musiques, un discours politique sans ambiguïté et une fougue infatigable depuis 1979 !




Imafa / Akosh S. Unit / 1998 / Barclay

La légende raconte que les musiciens de Noir Désir auraient découvert Akosh Szelevényi alors qu'il jouait dans la rue. Sans nul doute, la musique atypique du saxophoniste / clarinettiste a pu bénéficier de l'aura du groupe bordelais pour se faire connaître d'un public non coutumier du free jazz, des musiques improvisées.
Dans Azertis, Akosh nous donne un condensé de ce qu'est sa personnalité musicale. Montant peu à peu vers une certaine incandescence (amenant même peut-être à une transe à rapprocher de ce que peut provoquer la techno), ce morceau est un pour moi un hymne à la vie dans un monde tourmenté.




Piano works (selection) / Erik Satie (par Klara Körmendi) / 1989 / Naxos

A l'époque phare du CD, le label Naxos proposait des œuvres classiques (avec souvent des interprétations plus que correctes) à prix attractif, facilitant ainsi, en partie tout du moins, l'accès à la musique classique pour le commun des mortels. C'est en travaillant la première Gymnopédie au sein de l'harmonie dans laquelle je jouais dans mon adolescence que j'ai découvert l'existence de ce compositeur inspiré et de ses œuvres aux titres surréalistes, ignorant qu'il s'agissait d'un tube du répertoire.




The great Kai & J.J. / J.J. Johnson, Kai Winding / 1960 / Impulse !

Parce que je suis tromboniste et qu'il fallait bien choisir... Une rencontre au sommet, avec un casting de choix : Bill Evans (piano) et Paul Chambers (contrebasse) pour ne citer qu'eux. Et donc « Blue Monk » parce que Monk quand même, et parce que le trombone ajoute un côté groovy, aérien, velouté, léger à ce standard incontournable.




Broken homeland / Valparaiso / 2017 / Zamora label

Valparaiso est une ville que j'aurais aimé visiter. Quand j'ai vu ce nom émerger dans les sorties d'albums ça m'a forcément mis la puce à l'oreille. Bien m'en a pris puisque ce groupe fondé par des membres de feu Jack the Ripper fourmille d'invités de choix qui m'ont toujours apporté beaucoup d'émotions musicalement parlant : Dominique A, Marc Huyghens (Venus), Rosemary Standley (Moriarty), Shannon Wright, John Parish ou encore Christine Ott aux ondes Martenot. « Flygskam » oblige, je n'irai sûrement pas voir Valparaiso de mes propres yeux mais grâce à cet album, mes oreilles y seront allées en quelque sorte.




Altiplano / Magic Malik Orchestra / 2008 / Accords Croisés

Magic Malik dans les années 2000, c’était un peu le Ibrahim Maalouf de la flûte. Découvert dans le giron de M, Vincent Ségal et Cyril Atef, il a donc touché à la « variété », en passant par le jazz, la « world », sans s'interdire des chemins plus radicaux et expérimentaux. Dans cet album Malik s'aventure donc dans les Andes. Je voulais faire de la flûte quand j'étais petit, j'aime les pays latino-américains, le jazz y compris quand il sort de ses sentiers battus... Il ne m'en faut pas plus...




Salem tradition / Christine Salem / 2013 / Cobalt

Avec sa voix profonde et son charisme sur scène, Christine Salem apporte un supplément d'âme au maloya réunionnais, ce genre musical jadis (enfin dans les années 50 ça reste récent) interdit par l'état français et désormais inscrit au patrimoine immatériel de l'humanité de l'UNESCO.
Ça se découvre, ça se vit si possible en live, ça s'écoute sans forcément avoir besoin de beaucoup de mots pour y prendre goût.




Dogrel / Fontaines D.C. / 2019 / Partisan records

Le haut du panier de la nouvelle scène post-punk irlandaise. Formé il y a 3 ans, le groupe dublinois a sorti sont premier album en 2019. Une belle claque pour moi ! La musique de Fontaines D.C. rappelle les légendes du punk-rock britannique tout en revendiquant un attachement fort à l'Irlande et ses artistes. J'ai eu plusieurs fois l'occasion de me rendre en Irlande et je peux dire que presque tout m'intéresse dans ce pays : ses paysages, son histoire...et sa musique bien entendu !




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Comment écoutes-tu la musique aujourd'hui ? 
Chez moi j'écoute à 90 % des CD ou des vinyles. Il m'arrive d'écouter aussi des choses sur mon ordinateur qui est relié aux enceintes de ma chaîne. Dans ce cas c'est des choses que je veux découvrir ou des choses que me font découvrir mes enfants. Au travail, j'écoute sur des enceintes reliées à mon ordinateur. La collègue qui partage mon bureau est très tolérante, je ne suis donc pas obligé d'écouter au casque. En voiture, pour aller au travail j'écoute plutôt la radio, les informations et puis je co-voiture avec un collègue. La conversation va généralement bon train donc c'est peu compatible avec une écoute attentive. Et lorsque je prends le train, je fais le plein de bonne musique sur mon téléphone.

Quelle plateforme de streaming utilises-tu ? As-tu un abonnement payant à Spotify, Deezer, ... ? Continues-tu à acheter des disques ? Des CD ? Des vinyles ? 
Je continue à acheter des vinyles et des CD lorsque l'occasion se présente. Habitant à la campagne, je profite généralement d'un passage en ville pour aller faire un tour chez un disquaire. Par ailleurs, travaillant en bibliothèque j'ai facilement accès à une bonne réserve de disques. Je ne suis donc pas abonné à une plate-forme de streaming. A titre professionnel mais aussi parfois personnel, il m'arrive d'utiliser DiMusic la plate-forme à laquelle sont abonnées les médiathèques de Rennes Métropole.

Quelques émissions de radio, ou web radios musicales écoutes-tu ? Comment te tiens-tu au courant de l'actualité musicale ? Radios ?, magazines ? Sites ? Blogs ? Festivals ? Médiathèque ? 
Pour la musique, j'aime écouter FIP et plus généralement toutes les radios publiques... Avec leurs fameuses playlists de grève savoureuses. Sinon je fouine à droite et à gauche sur internet. La Bretagne est une grande terre de festivals défricheurs, je scrute bien entendu leurs programmations pour faire de belles découvertes. Le bouche à oreille physique ou numérique, entre amis ou collègues, compte aussi beaucoup pour moi.

Quel lien fais-tu entre ta pratique musicale du trombone et l'écoute de la musique ? Est-ce que l'une nourrit l'autre ou les considères-tu comme deux activités assez séparées ? L'une prédomine-t-elle sur l'autre pour toi ? 
 Vaste question ! Il m'arrive d'écouter de la musique de façon très analytique, mais pour réellement l'apprécier j'essaye de m'en détacher, ça n'est pas toujours facile mais après plusieurs écoutes d'un même morceau ou d'un même album, ça se fait plus naturellement.