Ce poème de Guillaume Apollinaire (1880-1818) a été publié en 1913 dans le recueil Alcools. Le texte est inspiré de l'expérience douloureuse de l'auteur qui fut incarcéré pendant une semaine à la prison de la Santé en septembre 1911. Il était accusé de complicité de vol d'objets d'art au musée du Louvre, et sera par la suite innocenté.
A la Santé ! est composé de 6 parties numérotées. Dmitri Chostakovitch en a mis en musique de larges extraits pour en faire le 7ème mouvement de la Symphonie nº 14 (op. 135) pour soprano, basse, cordes et percussions créée en 1969.
Dans cette symphonie, outre des textes de Federico García Lorca, Wilhelm Küchelbecker et Rainer Maria Rilke, on retrouve 5 autres poèmes de Guillaume Apollinaire : Loreley, Le Suicidé, Les Attentives I, Les Attentives II, Réponse des cosaques zaporogues au sultan de Constantinople qui furent traduits et adaptés en russe par Mikhail Pavlovich Kudinov (1922-1994).
Le texte original en français est interprété ici par Dietrich Fischer-Dieskau, avec le Concertgebouw Orchestra Amsterdam, dirigé par Bernard Haitink
Avant d’entrer dans ma cellule
Il a fallu me mettre nu
Et quelle voix sinistre ulule
Guillaume qu’es-tu devenu
Adieu adieu chantante ronde
Ô mes années ô jeunes filles
Le Lazare entrant dans la tombe
Au lieu d’en sortir comme il fit
Non je ne me sens plus là
Moi-même
Je suis le quinze de la
Onzième
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Tournons tournons tournons toujours
Le ciel est bleu comme une chaîne
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur
Toi qui me l’as donnée
Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur
Et tous ces pauvres cœurs battant dans la prison
L’Amour qui m’accompagne
Prends en pitié surtout ma débile raison
Et ce désespoir qui la gagne
Le jour s’en va voici que brûle
Une lampe dans la prison
Nous sommes seuls dans ma cellule
Belle clarté Chère raison
Septembre 1911.